Les Etat Européens reculent face aux lobbies OGM
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Les Ministres de l’Environnement des 28 États membres de l’UE s’apprêtent à adopter à Luxembourg une proposition élaborée sous la présidence grecque de l’UE sur les interdictions nationales d’OGM.

La France fait une très grande erreur d’analyse  en soutenant cette proposition. La possibilité pour un État-membre d’obtenir  l’exclusion totale ou partielle de son territoire d’une mise en culture sera totalement sous l’emprise de la Commission et des entreprises dont  l’objectif commun était:
enfin accélérer le processus d’autorisation et ainsi ouvrir le territoire européen aux plantes OGM.

Les États qui voudront interdire des cultures GM ou celle du maïs génétiquement modifié, par exemple, devront avoir préalablement négocié avec les entreprises par l’intermédiaire de la Commission pour obtenir une exclusion totale ou partielle de cette plante OGM dans leur territoire.
Ce sont donc les entreprises multinationales des biotechnologies qui décideront ou non de la carte de la production d’OGM en Europe et non plus les États.
Si les semenciers refusent de permettre à un Etat-membre de ne pas cultiver la nouvelle plante OGM autorisée, celui-ci pourra alors essayer de le faire pour des critères autres que sanitaires ou environnementaux, c’est à dire d’ordres socio-économiques ou territoriaux.
Cette deuxième procédure sera très fragile juridiquement tant au niveau européen qu’au niveau international, en particulier dans un recours devant l’OMC.

A ce stade, une question doit être posée à la France:
A-t-elle besoin de soutenir le dispositif européen proposé alors qu’elle a su gérer ce dossier au niveau national d’abord avec le nouvel arrêté d’interdiction du maïs OGM Mon810 et ensuite avec le vote le 5 mai dernier d’une loi d’interdiction du même OGM par le Parlement confirmée par le Conseil Constitutionnel. Ce dispositif a donc permis de démontrer qu’un État peut prendre ce type de décision  sans avoir à obtenir l’aval d’un firme semencière.

Cela  laisse du  temps pour travailler sur les  lacunes et les points faibles encore existants du texte proposé.

Pour moi, les États doivent encore obtenir:
– l’abandon du rôle attribué aux entreprises semencières dans la procédure d’autorisation  telle que proposée actuellement qui consisterait, ni plus ni moins, qu’à anticiper le pouvoir qu’elles visent à obtenir sur le dossier OGM dans le cadre du traité de libre-échange UE-Etats-Unis
– un vrai renforcement de l’évaluation des risques environnementaux dans les autorisations de mise en culture
– la prise en compte des effets socio-économiques  entre autre en cas de contamination, indemnisation des préjudices subis les agriculteurs et les apiculteurs conventionnels ou en agriculture biologique qui veulent produire sans OGM.

En outre, ce texte devant passer en seconde lecture devant le Parlement, les Verts/ALE seront à la pointe du combat pour rejeter cette proposition de renationalisation des cultures OGM.

Pendant des mois, le Président de la République et son gouvernement ont joué un double  jeu indigne  en se présentant  publiquement comme des opposants aux plantes OGM en France.
En votant cette proposition au Conseil Environnement  jeudi prochain, le masque tombera car cette proposition est un piège et un marché de dupes.

En donnant son accord à cette  proposition, le gouvernement français n’écouterait ni  la volonté des paysans refusant les contaminations génétiques de leurs productions biologiques ou conventionnelles, ni celle  des consommateurs, pas plus que celle du Parlement européen en janvier dernier qui refusait l’autorisation du maïs OGM TC1507 de  Pioneer.

Faire ce choix, c’est trahir les engagements pris, c’est trahir l’opposition des paysans et des citoyens à l’appropriation du vivant par la technique et les brevets.

J’appelle de nouveau le gouvernement français à refuser cette proposition le 12 Juin 2014 au Conseil Environnement et à trouver avec les pays historiquement opposés aux OGM en Europe une alliance pour y parvenir.

Oui à une Europe solidaire sans OGM, c’est pour cela que vous avez été élu et non pour faire le contraire« .

José Bové, Député européen Verts/ALE, Vice-Président de la Commission de l’Agriculture et du développement rural.