PSA : Retour au reel
Partager

Après le barnum électoral, place aux choses sérieuses.  A la demande du gouvernement Sarkozy – Fillon, PSA, comme d’autres grandes entreprises, avait mis entre parenthèses ses plans massifs de licenciements.  Au cœur de l’été, juste après la Conférence sociale, les patrons voyous mettent fin au suspens … déjà dénoncé depuis plus d’un an par la CGT de l’Usine d’Aulnay.  La facture est lourde :  3300 emplois supprimés et la fermeture de l’usine à PSA Aulnay, ce qui veut dire au bas mot, 10.000 emplois à terme, avec les sous-traitants et les emplois induits, 1.400 à Rennes …
Pour le gouvernement Hollande – Ayrault, revient le spectre d’une affaire qui avait mis à mal la gauche plurielle de 1997, avec la fermeture de l’usine de montage de Renault Vilvoorde.

La réalité, c’est la crise de l’industrie automobile européenne depuis 30 ans qui, de restructurations en fermetures de sites, prend le chemin de la sidérurgie des années 1980.  Seul le ministre Montebourg s’interroge encore sur la réalité de cette crise en refusant de mettre en avant une stratégie de reconversion globale de la filière ou en appelant à la lutte contre le capitalisme mondialisé.

Or, PSA est une entreprise « bien de chez nous ».  L’actionnaire de référence du groupe est constitué depuis plus d’un siècle par la même famille, les Peugeot.  Jusqu’à cet hiver 2012, elle avait refusé toute fusion avec plus gros.  Renault, satellisé par Nissan ou Fiat, recentrant son activité autour de Chrysler, a fait des choix différents.  PSA s’est retrouvé en retard sur la voie de l’internationalisation :  en 2009, 73% de la production totale de Renault étaient réalisés hors de France, contre 62% pour PSA.  Pour investir davantage dans les nouveaux pays de conquête automobile, les ressources nécessaires sont à trouver dans le profit réalisé grâce aux travailleurs des usines européennes.  Jamais, avant 2012, les firmes automobiles n’auront produit et vendu autant de voitures dans le monde.  PSA, dépassé par les événements, conclut à la va-vite une alliance avec General Motors en mars 2012.  Son arrivée dans le capital de PSA se traduit par des plans des bureaux d’études échangés, des achats mis en commun, une logistique partagée et, surtout, la restructuration coordonnée des appareils de production en Europe :  cette alliance se fixe comme objectif encore plus de suppressions d’emplois et de fermetures d’usines.  Si l’on ajoute que certains postes d’avenir dans la recherche et le développement sont également supprimés, on peut se demander si PSA n’est donc pas dans une autre stratégie :  la préparation d’une liquidation – fusion avec General Motors.  Même l’annonce du chiffre des ventes de voiture souligne cette stratégie.  La direction « oublie » en effet de préciser que, suite à l’accord avec GM, elle a décidé de suivre l’embargo américain sur le marché iranien.  Or ce marché tenait jusqu’alors la deuxième place dans les ventes du groupe, juste après la France.  En renonçant à exporter en Iran, PSA a décidé de s’asseoir sur 457.000 voitures vendues par an (en 2011), soit quelque 200.000 en six mois … Quelle surprise, tout juste le chiffre de baisse des ventes, annoncé cette semaine!

En réalité, l’annonce prévue depuis longtemps de la fermeture d’une usine de montage est inscrite dans la stratégie de délocalisation pour faire baisser le coût de travail.  Un signe qui ne trompe pas :  Laurence Parisot a évidemment pris fait et cause pour la fermeture d’Aulnay en expliquant qu’il fallait « accepter des restructurations » au nom de la compétitivité, même si c’était « douloureux », argument qu’elle avait déjà mis en avant lors de la Conférence Sociale.  Il y a au moins une catégorie de la population que ces manœuvres rendent enthousiaste :  ce sont les spéculateurs.  Le jour de l’annonce par le groupe des milliers de licenciements, l’action du groupe a bondi … de plus de 5%!

Dès lors, la colère sociale risque de s’exprimer à partir de septembre et de fédérer autour de PSA les secteurs où sont menacés plus de 60.000 emplois, comme dans les transports (Air France), le commerce (Carrefour), la santé (Sanofi), l’agro-alimentaire (Doux).  Cette mobilisation se battra à juste titre pour le maintien des emploi et contre la fermeture des sites industriels.  A l’usine Ford de Blanquefort, en Gironde, cette mobilisation avait empêche les licenciements.

Mais le gouvernement est obligé de voir plus loin.  Il ne peut se résigner à jouer au pompier de service en essayant d’atténuer au cas par cas les plans de licenciements, en négociant quelques miettes avec ceux qui reçoivent des milliards d’aide par an pour « assainir » leur industrie.  Ces aides doivent maintenant être supprimées, ou conditionnées sévèrement.  De même, nous devons revoir d’urgence les conditions d’applications de ces plans de licenciements, qui devraient pouvoir être suspendus lorsque l’entreprises redistribue des bénéfices à ses actionnaires sans tenir compte de l’emploi de ses salaries.  La droite et le MEDEF avaient hurlé au loup quand quelques-uns, à gauche, avaient proposé de rétablir l’autorisation administrative de licenciement, mais lorque l’on voit l’arrogance de ces gens qui bénéficient de parachutes dorés, de stocks options, de salaires faramineux, alors que leurs mauvais gestion conduit leurs entreprises à la faillite et leurs salariés au chômage, on ne peut que se reposer la question.  En même temps, il faut construire un bouclier social européen, en imposant à Bruxelles que ses aides aux entreprises délocalisant hors Union Européenne soient supprimées.  Le dumping social, ça suffit!

Mais, au-delà de ces mesures d’urgence, l’exemple du secteur automobile illustre bien la nécessité de la conversion écologique de l’économie.  Si nous voulons éviter de rejouer la mauvais pièce de la sidérurgie lorraine, où l’on a sciemment menti aux populations sur l’avenir de cette industrie, nous devons dire la vérité:  la circulation automobile régressera.  C’est une réalité parce que la société de l’après-pétrole a déjà commencé.  La conversion est une mesure de bon sens pour désengorger les villes et lutter contre la pollution urbaine.  C’est aussi une nécessité climatique et un enjeu écologique majeur :  les transports comptent pour 31% de la consommation d’énergie finale, 70% de la consommation de pétrole et 25% des émissions de CO2.  L’automobile à elle seule représente 12% des émissions en Europe.  Des centaines de milliers de familles sont aujourd’hui concernées par l’avenir de cette industrie et l’automobile représente 15% du budget des ménages.  Je refuse que cette mutation se fasse sur le dos de ses salariés en raison de l’imprévoyance du patronat de ce secteur.  C’est pourquoi je propose que l’État, en liaison avec l’Union européenne, établisse un contrat de conversion écologique du secteur automobile.  Il faut que, simultanément, nous mettions en place un « Grenelle de l’automobile », pour examiner toutes les pistes à mettre en place et la tenue d’un « Bruxelles de l’emploi » qui réunirait les entreprises, la Confédération européenne des syndicats, les associations de consommateurs, la Commission européenne, les représentants du Parlement …

La crise de l’automobile en Europe concerne 2,5 millions de familles.  Si l’Europe veut faire un pas vers son intégration, elle doit se saisir de cet exemple, d’autant plus que c’est chez les nouveaux entrants, comme la Roumanie, que les entreprise de l’automobile ont délocalisé à tour de bras pour faire baisser le coût du travail et réaliser des profits maximum.  Tout désormais, doit être mis sur la tabla.

 
 

Autour : Noël Mamère
Sources :  www.noelmamere.fr